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A quelle association donner nos sous ?

Publié le par road-movie

Une petite réflection pour aider au choix...

Lettre ouverte d'Alain LIPIETZ à la Fondation de l’avenir, à l’Association de recherches contre le cancer, aux Instituts Gustave Roussy, Curie, etc.

J’ai laissé passé le délai de rigueur : on ne m’accusera pas d’avoir saboté votre collecte de dons 2012 par un boycott d’humeur. Mais cette fois, malgré tous vos rappels, j’ai réservé mes dons aux associations pour l’environnement, pour le soutien aux plus démunis (ici et là-bas), aux recherches sur Alzheimer… Pourtant, depuis le cancer de feu ma compagne, décédée il y a quelques années, je vous faisais régulièrement des dons. La lutte pour guérir cette maladie me semblait effectivement sous-évaluée dans les politiques publiques.

Mais, personnellement, je n’ai pas encore le cancer, et mon problème, comme celui de la majorité de mes concitoyens, est d’éviter de l’avoir. Or je dois bien le constater : dans les recherches que vous financez avec nos dons, la prévention n’a aucune place.

Votre passivité face aux expériences de Gilles-Éric Seralini m’a choqué. Il soulevait pourtant un fameux lièvre : le caractère cancérigène de certains OGM dispersés dans la nature ou dans les aliments. On a critiqué le nombre insuffisant de ses rats (sans trop relever que son expérience était beaucoup plus longue que celles ayant conduit à l’autorisation de ces mêmes OGM). Je m’attendais donc à une ruée de la recherche française en cancérologie vers des expériences tendant à confirmer ou infirmer celle de Séralini, et à les étendre à d’autres substances. Rien de tout cela n’apparaît dans vos bulletins.

Comprenez-moi bien. Les dons aux associations d’utilité publique sont certes déduits aux deux tiers de nos impôts. Ce n’est pourtant pas une niche fiscale. Le troisième tiers, nous le payons plein pot : pour avoir simplement le droit d’orienter, sur nos impôts , les deux premiers tiers vers des dépenses autrement utiles que le « Crédit d’Impôt Compétitivité » offert à Total ou à Mittal. Pour un ménage qui paie 5000 euros d’impôt et vous fait 1500 euros de dons, 1000 euros sont remboursés sur ces impôts. Mais au final il aura payé 5500 euros, 500 de plus que ce que lui réclame le fisc, pour le plaisir de vous voir en recevoir, vous, 1500, que l’État ne vous aurait pas offerts autrement.

Que le gros de la recherche médicale, pharmaceutique ou hospitalière, serve à soigner les maladies déjà contractées se comprend : elle est en dernier analyse financée essentiellement par la Sécurité sociale-Maladie, à l’occasion du remboursement des soins et médicaments.

Que la recherche publique hésite à s’aventurer vers la prévention se comprend aussi. Pasteur et ses disciples prêchaient l’hygiène pour débarrasser l’espèce humaine des microbes qui l’empoisonnaient depuis des millénaires. Les poisons à combattre aujourd’hui, les germes de « ces maladies crées par l’homme » comme dit le Pr Belpomme, maladies chroniques telles que cancers, asthme, diabètes, infécondité, autisme, allergie, malformations, j’en passe et des pires, sont les résidus de l’activité de grandes entreprises : OGM, pesticides, herbicides, diesel et autres produits chimiques mutagènes, cancérigènes, reprotoxiques, allergisants... On comprend que la recherche d’un État qui défend « ses » entreprises hésite à affronter de tels mastodontes (qui d’ailleurs la cofinance). L’hygiénisme public anti-Total ou PSA n’est pas pour demain.

Alors, que nous reste-t-il à nous, malades en puissance, pour débusquer, dénoncer les responsables de ces maladies qui nous guettent ? Vos associations. Financées par nous, indépendantes des grands lobbys et de « la compétitivité nationale », vous étiez notre seul espoir. Vous avez failli.

Sans ignorer l’importance de guérir le cancer de ceux qui l’ont déjà, je suspends donc mes contributions, jusqu’à ce que vous daigniez vous intéresser au sort de ceux qui ne l’ont pas encore. Dès 2013 j’espère.

Avec tous mes encouragements

Alain Lipietz

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